Historique
Depuis quelques années, au côté des modèles majeurs que sont la souris, la mouche drosophile ou l’arabette des dames, les espèces modèles utilisées en biologie se sont considérablement diversifiées, tant au niveau mondial, qu’européen et français.
Cette diversification peut s’expliquer par la redécouverte de la forte unité du vivant et de l’utilisation récurrente de certains réseaux de gènes très conservés au cours de l’évolution. D’autre part, la pression règlementaire et sociétale sur l’utilisation des mammifères en recherche s’est considérablement accrue. Le faible coût de maintien d’animaux ou de végétaux modèles plus simples, et aussi la multiplication des espèces pour lesquelles des données de séquençage du génome ont été obtenues, ont rendu ces modèles de plus en plus attractifs.
De nombreuses équipes de recherche (CEA, CIRAD, CNRS, IFREMER, INRA, INSERM, Universités/Grandes Ecoles, etc.) utilisent ainsi différents modèles pour donner des réponses complémentaires à leurs questions biologiques, et ont mis en place des structures appropriées (plateformes, plateaux-techniques ou laboratoires de référence). Ces structures doivent être davantage soutenues pour leur permettre de développer des technologies innovantes visant à une meilleure compréhension de la fonction des gènes.
Dans ce contexte, le réseau EFOR (Réseau d’Etudes Fonctionnelles chez les ORganismes modèles) a été mis en place pour recenser les espèces concernées ainsi que les structures et laboratoires porteurs du développement de ces modèles, et motiver le financement de ces recherches. La France, qui possède un potentiel exceptionnel, sera ainsi valorisée aux niveaux européen et mondial.
D'où vient EFOR ?
L’idée du réseau EFOR a émergé à la suite d’une réunion organisée par Marie Malissen et Alix de la Coste dans le cadre du GIS-IBiSA (Groupement d’Intérêt Scientifique-Infrastructures en Biologie Sante et Agronomie), lors du comité explorations fonctionnelles. A cette occasion, la rencontre de plusieurs scientifiques d’horizons divers a conduit à la mise en route de plusieurs actions, en particulier deux réseaux depuis lors soutenus par le GIS-IBiSA : le réseau ROCAD (Réseau Opérationnel de Centres pour faciliter l’Accès et la Distribution des modèles souris), centré sur l’utilisation de la souris et le réseau EFOR.
Pourquoi EFOR ?
Une forte demande en recherche médicale et agronomique
La souris et les autres modèles principaux d’EFOR (pour la liste : barre du menu, onglet « Organismes modèles », premier menu déroulant) sont des modèles privilégiés en recherche, et sont développés et soutenus depuis plusieurs années. L’objet d’EFOR n’est pas un simple renforcement du soutien dans ce domaine.
En santé, les biotechnologies permettant d’obtenir des lignées spécialisées d’animaux pour servir de modèles à une pathologie sont en essor constant. Ces lignées constituent le socle de criblages à haut débit : techniques visant à étudier et à identifier des molécules aux propriétés nouvelles, biologiquement actives et de les tester in vitro sur du matériel issu de ces lignées. Ainsi, la combinaison de ces lignées modèles et de ces techniques visent au développement de nouveaux médicaments pour les pathologies majeures ou pour des maladies rares. Il est à noter qu’en plus de ces lignées spécialisées, de nombreuses espèces initialement utilisées à des fins agronomiques, constituent aujourd’hui d’excellents modèles pour des questions à vocation biomédicale.
Les motivations dans le domaine agronomique sont différentes : les modèles animaux et végétaux simplifient l’identification des mécanismes moléculaires modifiant les différents caractères dits de rendement (qualité de la viande, du lait, etc.) et facilitent l’adaptation aux variations du climat (sécheresse) et du biotope (résistance à la salinité), ainsi qu’aux pathologies.
Une demande sociétale encourage l’utilisation d’organismes modèles simples et moins soumis aux pressions réglementaires
Aujourd’hui, de nombreux groupes de réflexion sur l’utilisation des mammifères en recherche biologique permettent d’améliorer le bien-être animal en instaurant de nouvelles réglementations :
- En toxicologie, le règlement européen REACH (Registration, Evaluation, Authorisation and restriction of CHemical substances) recommande de développer des méthodes alternatives à une expérimentation in vivo centrée sur les mammifères ;
- Un projet de directive doit réglementer la protection des vertébrés utilisés à des fins de recherche et d’essais ;
- Au niveau national, un GIS dédié au recensement des méthodes alternatives dans ce domaine et à leur validation dans les procédures d’essais doit être mis en place ;
- A l’issue des rencontres « animal et société » organisées par le ministère de l’agriculture en Mai 2008, le ministère de la recherche a souhaité recenser les méthodes existant et les moyens mis en œuvre pour les développer.
La substitution d’une espèce dite « peu sensible » à une espèce sensible constitue l’alternative la plus classique : au plan éthique, il est plus apprécié d’effectuer chez différentes espèces non mammifères, voire non vertébrés des cribles de molécules pour rechercher des nouveaux médicaments ou pour en caractériser les effets toxiques. Bien que la notion d’espèce sensible reste majoritairement subjective et émotionnelle, surtout lorsque l’on évoque les carnivores domestiques, il existe une différence objective : certaines espèces modèles sont moins contraignantes que d’autres en terme d’environnement expérimental et de charges administratives, et elles sont donc de plus en plus utilisées.
Une demande en forte augmentation en post-génomique, biologie intégrative et biologie des systèmes
Ces dernières années, la bioinformatique et la modélisation (méthodes in silico) ont connu un essor important. Dans ce cadre, les organismes modèles offrent de nouvelles perspectives de validation in vivo d’expériences in silico. Certains organismes simples offrent un faible coût de maintien, favorisant les approches à grande échelle.
Une forte augmentation du nombre d’espèces et de lignées d’organismes modèles utilisés
La diversification des familles de protéines ciblées, des tissus concernés (muscles, gonades, système nerveux, fleur, méristèmes, etc.) ou des fonctions affectées (résistance aux médicaments ou à la salinité, tumorigenèse, etc.) a entraîné l’augmentation du nombre d’espèces modèles utilisées, chacune ayant des spécificités biologiques adaptées à une question particulière.
À ce jour, EFOR recense près de trente espèces animales et près de vingt espèces végétales.